François Reyssat – ATER en sociologie à l'Université de Paris Nanterre
Sociologie – Thèse soutenue le 11 décembre 2015 à Paris Diderot
Dominations et résistances au travail. Enquête sur l'expérience corporelle des ouvrières et ouvriers du nettoyage.
Cette thèse s'intéresse aux relations de domination et aux résistances qu'elles provoquent dans le travail de nettoyage. Plus précisément, c'est l'expérience corporelle que font les ouvriers et ouvrières du nettoyage qui est au centre de ce travail universitaire. L'enquête s'appuie sur une immersion de l'auteur, qui a travaillé comme nettoyeur dans trois entreprises – deux entreprises de nettoyage et une crèche. Les données recueillies au cours de cette immersion sont complétées par des entretiens et une analyse de données quantitatives de l'Insee notamment. Il est possible de considérer les nettoyeurs et les nettoyeuses comme un groupe professionnel particulier, constitué sur la base d'une réalité sociale partagée. La thèse met alors au jour une structure objective du travail, des relations de domination, des corps qui se redéfinissent, sont réaffirmés ou contestés, en fonction des particularités du nettoyage et tout particulièrement de la nature productrice d'une absence (de sale) de cette activité. Certains nettoyeurs et nettoyeuses se considèrent comme des « professionnels » du secteur, tandis qu'une majorité ne s'identifie que peu par rapport à son travail. Car ces individus sont également aux prises avec des mécanismes plus larges. Il est impossible de saisir le sens des actions et des représentations des ouvriers et ouvrières du nettoyage sans considérer qu'ils appartiennent aux classes populaires, et évoluent au sein d'un monde dont le fonctionnement est loin de n'être régi que par l'activité de travail salarié spécifique qu'ils exercent. La thèse s'intéresse ainsi également aux mécanismes de mobilité professionnelle, aux migrations géographiques, aux trajectoires sociales des nettoyeurs et des nettoyeuses. On y retrouve des caractéristiques partagées au sein des classes populaires, mais qui prennent une dimension particulière dans l'activité de nettoyage, qu'Hélène Bretin qualifiait déjà dans les années 90 « d'antichambre du chômage ».
Mise à jour le 1 décembre 2016